La Greina est une région qui relie les Grisons au Tessin. Dans les années 1970, il est envisagé d’y construire un barrage hydroélectrique qui inonderait le plateau. Une partie de la population se mobilise contre le projet, dont l’artiste britannique Bryan Cyril Thurston. Face à la caméra et à son fils Patrick, il revient sur cette période, racontant comment la Greina fut une formidable source d’inspiration pour lui… et pour d’autres !
“La Greina” de Patrick Thurston
avec Bryan Cyril Thurston
Date de sortie : 5 mars 2025
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« Pourtant, que la montagne est belle, comment peut-on s’imaginer en voyant un vol d’hirondelle que l’automne vient d’arriver » chantait Jean Ferrat. Combien de personnes ont-elles fredonné cette chanson en admirant les paysages de la Greina ? Niché entre le canton du Tessin et celui des Grisons, ce haut plateau surnommé la « toundra suisse » en raison de son immense marécage a été menacé dans les années 1970. Il s’agissait de construire une centrale hydroélectrique avec un lac de retenue qui aurait inondé ce coin de nature. Aujourd’hui, la région est protégée. En raison de son biotope extraordinaire et unique, elle est inscrite à l’inventaire fédéral des paysages, sites et monuments d’importance nationale comme zone protégé.
Pour parvenir à ce résultat, il aura fallu la mobilisation de toute une région et surtout d’un artiste, le peintre Bryan Cyril Thurston. Ce britannique diplômé du Royal Institute of British Architects s’est installé en Suisse en 1955 où il ouvre un atelier d’architecture et de peinture. Il s’enthousiasme pour ce « petit bout d’Ecosse dans les Alpes » qu’il parcourt régulièrement en randonnée. Ce documentaire lui rend hommage ainsi qu’à ce paysage austère et fascinant à la fois qui devient source d’inspiration car « la Greina est porteuse de divin ». Au cours des vingt années de lutte, il donne des interviews, créé des affiches ou des tableaux qu’il présente dans des expositions. Il aura ainsi exécuté plus de 3000 œuvres sur ce thème, transcrivant ses impressions à la pointe sèche sur des plaques de cuivre ou à l’aquarelle avec des tracés expressifs. Face à son fils, il se raconte et dévoile le lien particulier qui le lie à cette région. D’autres personnages sont appelés à intervenir, partageant ainsi leur propre regard sur ce plateau : une bergère, un maire, un architecte, un fromager. C’est aussi un appel à ce que l’art se mette au service de la protection de l’environnement.
Le documentaire se termine sur l’intervention de la socialiste et ancienne conseillère fédérale Ruth Dreifuss qui rappelle l’existence du « centime paysager ». Afin de protéger la beauté des sites qui serait menacée par la construction d’usines hydraliques, tout en prenant en compte le besoin légitime de ressources financières de la part de certains villages, la confédération alloue des montants compensatoires qui s’élève au plus à 1 franc par kilowatt théorique. Depuis 1996 et le sauvetage de la Greina, les deux communes grisonnes de Vrin et de Sumvitg en bénéficient, suivies de 17 autres communes (Ausserberg, Baltschieder, Binn, Birgisch, Brigels, Chalais, Châtillon-le-Bas, Eggerberg, Gondo, Grône, Mörel, Mund, Naters, Nax, Rarogne, Ried, Simplon). La beauté des paysages n’a pas de prix.
Alors, quand est-ce qu’on s’organise un séjour là-bas ?
Un documentaire qui fait du bien.
Virginie Hours, reporter pour Color My Geneva – tous droits réservés