À travers ses sublimes haïkus, ses livres, ses audacieuses créations vestimentaires et son art de vivre, elle nous fait voyager.
Vous écrivez des poèmes, des haïkus. Votre processus d’écriture se tisse beaucoup dans le découpage, dans le rythme. Pourriez-vous nous l’expliquer, mAL ?
Le haïku, pour les néophytes, est un poème miniature créé au Japon. C’est une explosion, une respiration, un amuse-bouche, un instantané, un baiser, le Big Bang quoi ! Lorsque j’écris des haïkus, je découpe dans la réalité ce qui attire mon attention, et ce en 17 syllabes. Comme les enfants, mon regard se pose sur l’insignifiant, le banal. Je m’amuse ensuite à rythmer ce découpage. Ceci dit, il y a une grande part de spontané, d’intuitif, d’évidence, ce qui laisse très peu de place au mental et à l’intellect. Une partie du processus d’écriture m’échappe complètement. S’y mêlent un torrent d’émotions incontrôlées, d’où les bienfaits thérapeutiques du haïku, où le ras le bol rebondit avec humour. Mes haïkus, que je ne retravaille quasiment pas, jaillissent comme notre jet d’eau.
Que représente le Japon pour vous, mAL ?
Le Japon c’est une relation unique à l’esthétique. Mes haïkus boivent aux sources bien évidemment pour ensuite s’en éloigner. D’ailleurs, j’écris des haïkus hybrides, inspirés des senryūs, mini-poèmes satiriques. Ils sont percutants, moqueurs. C’est cet aspect tout aussi provoquant que sensuel que m’inspire le Japon.
Il y a une forme de hiérarchie dans vos différentes formes d’expression artistique, mAL ?
La hiérarchie c’est pour les militaires et dictateurs. Pas pour moi ! Mes différentes facettes cohabitent comme les doigts de la main, se soutiennent mutuellement et s’amusent. Combiner ses formes artistiques pour faire sens, car je ne peux faire sans.
Écrivez-vous pour nous dévoiler vos mystères ou plutôt pour en créer, mAL ?
Quand j’écris, je plonge. Retour au fœtus, eaux profondes de mes angoisses. Réincarnation. “Ma” poésie naît mystérieusement. Le bal des mots crée du mystère et ses voix sont insondables.
En parlant des mystères de l’écriture et du processus de création, votre poésie est sensuelle et envoûtante… La synesthésie est présente dans vos textes et dans vos démarches artistiques. Vous aimez aussi danser : vos poèmes peuvent-ils être dessinés à travers la danse ? Pensez-vous que l’écriture est un geste fondamentalement sensuel ? Le dernier mot que vous ayez écrit avec votre corps…
Les haïkus ont pour vocation de stimuler l’autre, d’éveiller ses sens, de provoquer sa conscience, de chatouiller ses croyances. Je pense que l’écriture de haïkus est un acte plus sensuel et sensoriel qu’intellectuel. J’aime performer. J’ai eu l’occasion d’allier mouvement, respiration, râles et poésie. Des moments jubilatoires… Des projets exploratoires en 2022.
J’ai crié “liberté” avec mon corps. Pas sur un ton de révolte, avec conviction. J’ai d’ailleurs écrit des poèmes à ce sujet…
Vous semblez célébrer la poésie comme mode d’existence. Votre quotidien est aussi rempli de révélations, de clins d’œil artistiques, de petits poèmes, de danse, de création littéraire. L’écriture, selon vous, est une activité intime ou collective, mAL ?
Les deux. Un besoin d’être seule pour écrire, sorte de méditation active. Un besoin d’explorer d’autres possibles en collectivité. Un projet en devenir.
Quel rôle joue le voyage dans votre processus d’écriture ? Voyagez-vous en écrivant ?
Je voyage dans mon corps, mes cellules, mes neurones et dans l’espace-temps. J’écris dehors aussi, au contact de la nature, de la ville et des gens. J’observe d’un regard neuf ce qui m’entoure et m’abandonne. Deux voyages en vue : 1. deux haïkus-guides de voyage sur le Japon (remix de la collection limitée Côté cour – Côté jardin et 2. un nouveau recueil de haïkus gravitant autour des fleurs.
Il y a quelque chose de jouissif et de libertaire dans vos démarches si proches et accessibles. C’est quoi la poésie ? Pourriez-vous nous offrir un haïku d’inspiration genevoise ?
C’est l’explosion des mots rythmés par la respiration, le pétillant de l’esprit avec un zeste d’humour, le tout saupoudré de spontanéité. Un point d’ancrage, une blessure à vif, un espace hors temps, une caresse de l’âme, un coup de poing dans la gueule…
La jeune évidence
Vers les rives du lac s’avance
Là Genève y danse
Lancé comme une flèche
Le jet d’eau que rien n’assèche
Chaussettes sont-elles sèches
Une balade poétique et enchanteresse à Genève ?
Départ Bel-Air : longer le lac, traverser le parc de Mon-Repos, continuer vers le jardin botanique jusqu’au jardin japonais.
Immergez-vous dans l’univers sensuel, poétique, libre et voyageur de la poétesse mAL, et découvrez un nouvel incroyable talent genevois : @jade_sen_balance #haikubymal
Flávio D. – Reporter chez Color my Geneva – Tous droits réservés